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La plus importante collection d’art moderne existant en dehors de l’Europe de l’Ouest et de l’Amérique du Nord…Un des dix ensembles les plus complets sur l’évolution de l’art moderne… Pour la première fois, le Musée d’art contemporain de Téhéran dévoile ses trésors inestimables dans une exposition intitulée " le mouvement de l’art moderne."
" Je n’en crois pas mes yeux, ce tableau de Monnet, dont nous avons tant parlé pendant nos études, se trouve dans ce musée et nous appartient, à nous, les Iraniens ! " s’exclame Maryam Kâchâni, licenciée des Beaux-arts à l’Université de Téhéran. Les quelques 2000 visiteurs journaliers, en majorité des jeunes, affichent le même étonnement en découvrant les travaux de grands maîtres, dissimulés aux yeux du public, mais miraculeusement préservés dans les sous-sols du musée.
170 tableaux, 15 sculptures et trois œuvres conceptuelles sont exposés dans les galeries et le jardin du musée. Ils témoignent de la naissance et de l’évolution de l’art moderne du début du 20ème siècle jusqu’en 1970.
Ces illustres peintres et sculpteurs ont pour nom : Monnet, Degas, Van Gogh, Gauguin, Rothkow, Léger, Picasso, Vasarely, Rock, Kandinsky, Miro, Giacometti, Moore, Pollack, Jasper Jones, Andy Warhol, Salvador Dali, Marcel Duchamp et bien d’autres encore…ils sont tous là. D’après le professeur Pâkzâd, chercheur et auteur de l’ouvrage " La peinture de l’Iran, d’hier jusqu’à nos jours", seul Manet, Cézanne et Mondrian manquent au rendez-vous.
Une fois encore, ce pays se présente comme une terre de contrastes. Nul n’aurait pu soupçonner que l’un des berceaux de la tradition orientale puisse porter tant d’attention à la collecte des œuvres les plus marquantes de l’art moderne.
Lorsque Kamran Dibâ, au début des années 1970, devint l’architecte du Musée de l’art contemporain et en prit la direction, il lança l’idée de cette collection. Beaucoup crièrent au scandale, tant les fonds engagés dans cette entreprise leur semblèrent inappropriés. Il n’était donc pas étonnant que, pendant la tourmente révolutionnaire, la colère l’emportant sur la raison, on ait considéré un tel investissement comme un " gaspillage". Ce bien national se trouvait alors en grand danger, c’est pourquoi, l’excellente préservation de ces chefs-d’œuvre rescapés relève du mystère.
Mansour Maleki, responsable des relations publiques du musée, nous explique : " Le mot stock (anbâr), souvent utilisé par les médias, est attribué à un lieu où nous gardons des objets vieux et encombrants, alors que là, nous parlons d’un trésor préservé dans d’excellentes conditions atmosphériques, respectant les normes de conservation les plus strictes". Il en profite pour démentir les rumeurs et les doutes évoqués ces derniers temps au sujet de la préservation de ces pièces uniques. " Tous les travaux de maintenance, de protection ou de rénovation ont toujours été assumés par des sociétés expertes de renommée internationale et un certificat a été signé après chaque intervention, garantissant l’authenticité de l’œuvre. "
Aujourd’hui, Ali Reza Sami Azar, ex-directeur du Musée de l’art contemporain et initiateur de l’exposition du mouvement de l’art moderne, est fier de cette collection. Selon lui, la philosophie qui a conduit à l’élaboration de cet ensemble était fondée sur les courants artistiques qui ont suivi la deuxième guerre mondiale ; la quantité d’œuvres expressionnistes abstraites, de pop-art et de minimalistes le prouvent, des œuvres impressionnistes ont été intégrées par la suite à cette collection. " Pendant les sept années à la direction du musée, j’ai essayé en vain de convaincre nos responsables d’acheter des œuvres des années 1980, 1990 et même des travaux d’artistes actuels de grande renommée. Mais, il est vrai que cela aurait impliqué des dépenses s’élevant à des dizaines de millions de dollars. "
Financièrement, l’opération est loin d’être une simple manifestation de vanité. Inutile de poser la question, personne n’ose avancer des chiffres sur la valeur actuelle de ces tableaux. Mais, l’expert Samad Elahi, ironise : "Si on compare l’investissement effectué à cette époque pour l’achat de ces tableaux et leur estimation aujourd’hui, on s’aperçoit qu’ils ont largement dépassé la flambée des prix du pétrole actuel."
Dariush Aslâni, étudiant en droit, nous interpelle : "Nous aurions dû avoir accès à une telle exposition depuis longtemps. Nous devons rester en contact avec l’évolution de l’art dans le monde et nous pourrions peut-être démontrer que nous avons aussi des choses à dire dans ce domaine."